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Actualité du mythe
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Par Georges Bertin |
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"On ne peut étudier que ce qu'on a d'abord rêvé".
Gaston Bachelard.
Dans "La méthode: la Connaissance de la Connaissance", Edgar Morin met l'accent sur la présence occulte du mythe au coeur de notre monde contemporain et ce malgré l'opposition soigneusement entretenue entre les pensées rationnelle et mythique, entre science et religion. "Il a fallu, écrit-il, l'élargissement et l'autocritique de la pensée critique pour que celle-ci s'interroge sur l'universalité, le sens et la profondeur de la pensée mythologique". Parmi les fonctions du symbole, dans lequel il voit en particulier la concentration d'un coagulum de sens, soit "une constellation de significations et de représentations liées symboliquement par contiguïté, analogie, imbrication", il développe celle qui concerne la communauté[1].
De fait, entre l'imaginaire social, magma, réservoir de significations qui se proposent à l'émergence de la vie sociale et les contraintes rationnelles-réelles de l'organisation, le mythique relève du symbolique, dont il est "une succession organisée en récit"(G. Durand), il constitue ce que les professeurs Jean-Marie Brohm et Louis-Vincent Thomas ont appelé une transversalité.
Il interroge à la fois les couches profondes de la psyché, dans ce qu'elle a de plus radical comme dans ses formes immuables ordonnées aux besoins les plus fondamentaux de l'espèce et les formations dues à l'effervescence poétique, aux capacités instituantes mises en oeuvre par l'imagination créatrice. Il peut donc sembler légitime de s'interroger sur la fonction sociale du mythe à la fois garant de notre relation à ce qu'on a pu appeler l'arkhé et comme force productrice de sens:
d'abord parce qu'en tant que réalité touchant l'humain, comme nous le rappellent tous les grands textes fondateurs, des antiques à la psychanalyse, le mythe est l'objet d'une réflexion légitime, rien n'étant "indigne d'être objet de science"[2],
ensuite, parce qu' exerçant une domination manifeste sur la rationalité de nos systèmes politiques", le mythe plonge au plus profond de l'évolution humaine[3]. De fait, "l'histoire contemporaine, tout en dissolvant les anciennes mythologies, en secrète de nouvelles et régénère de façon proprement moderne la pensée symbolique / mythologique / magique laquelle s'est introduite dans la pensée rationnelle au moment où celle-ci la chassait de l'univers[4].
1) Définitions:
Regardons d'abord ce qu'est le mythe, dans ses acceptions les plus courantes.
Pour les grecs, le muthos est d'abord, à l'origine, simplement parole, discours, rumeur, nouvelle, dialogue, conversation, voire ordre, prescription, projet.
Après Homère, il se charge d'un autre sens, celui de récit non historique, fabuleux, de légende, de fable ou d'apologue. Muthologein signifie alors raconter des fables, composer des récits fabuleux, imaginer par fiction, le mythe est dès lors catégorie de l'Imaginaire. En effet, récits fondateurs, mettant en scène l'histoire des dieux et des hommes, les mythes fournissent "un ensemble de représentations des rapports du monde et de l'humanité avec les êtres invisibles"[5] .Oscillant entre science et légende, ils contribuent à une mise en place de l'ordre rationnel, à situer l'homme dans l'univers. Le mythe est, dans ce sens, "reconnu pour vrai par les sociétés qui le racontent même s'il n'y a rien de vraisemblable pour l'observateur"[6].
C'est sans doute ce qui faisait écrire à Claude Lévi-Strauss que le mythe est "une histoire du temps où les hommes et les animaux n'étaient pas encore distincts"[7], le mythe racontant l'événement fondateur de la condition humaine, de la cité, du peuple, expliquant "pourquoi les choses, différentes au départ, sont devenues comme elles sont et pourquoi il ne peut en être autrement".
Cette idée de récit fabuleux ayant à voir avec les origines est également développée par Gilbert Durand qui s'intéresse plus, pour ce qui le concerne à la structure du mythe: "système dynamique de symboles, d'archétypes, de schèmes qui, sous l'impulsion d'un schème, tend à se composer en récit". Et de mettre l'accent sur la prétention du mythe à une rationalisation, soit une tentative d'explication du monde ou des phénomènes naturels.
Paul Verdier[8] se propose pour sa part de considérer le mythe comme facteur de relation entre le Divin et le Temps. Pour lui le recours aux mythes correspondrait à la nécessité où se trouvent les hommes de penser le Temps, de définir des cycles temporels qui définiraient la vie des dieux impensable pour l'homme qui ne dispose que des computs solaires et lunaires pour déterminer les rythmes de sa propre vie. La mythologie et ses récits auraient dés lors pour fonction d'identifier des positions remarquables de la course du Temps par la mise en place de ces révélateurs temporels que sont les fêtes solaires, lorsqu'elles signifient la coïncidence de la course de la Lune et du Soleil, établissant en quelque sorte des résumés du temps. Ainsi les Celtes ont établi un système calendaire qui résume et simplifie la vaste période sacrée de la vie des Dieux, le temps divin étant trop long pour que l'homme puisse le connaître réellement.
Les mythes sont ainsi de grands récits qui "placent l'humanité entière et son drame sous le signe d'un homme exemplaire, qui donnent à l'histoire un élan, une allure, une orientation (par exemple Adam représente, sur le mode symbolique, l'universel concret de l'expérience humaine), qui explorent la faille de la réalité humaine. Le mythe ne peut prendre que dans une multiplicité de récits et nous laisse en face d'une diversité sans fin de systèmes symboliques, semblables aux langues multiples d'un sacré flottant"[9].
Jacques Ardoino, prenant appui sur l'approche sémantique du modèle oedipien, insiste pour sa part sur l'Universalité de la fonction du mythe, comme construction d'un "modèle a posteriori, comme processus de symbolisation propre à toute société, à tout système culturel, à tout individu dans ce système"[10]. C'est un mode de connaissance qui complète la rationalité des thèmes de la vie. Il n'est pas projection fantastique de la réalité, mais "révélation au sens profond"[11]. Il est ainsi, comme l'a remarqué Gilbert Durand, à la fois:
épistémé: sédimentation naturelle, culturelle, des visions du monde dans l'évolution de sociétés,
carrefour transdisciplinaire, lieu de mise en commun de complémentarités car favorisant l'émergence de figures autres, laissées pour compte de la pensée.
Et, de ce fait, il justifie, d'approches diverses, croisées, transversales à la fois:
phénoménologique, afin de le replacer dans une totalité plus vaste, de faire apparaître, par comparaison, des cohérences, des répétitions,
herméneutique quand il révèle la parole des hommes et dégage un sens mettant en mouvement la pensée
dans l'ordre du langage qu'il convient de mettre en décodage tout en sachant bien que, par son equivocité même, le mythe y résiste.
2) Mythe et recherche.
L'opposition entre Mythe et recherche scientifique, entre pensée savante et pensée mythique semble désormais consacrée par le langage courant comme l'est le clivage réel/mythique. Au savant incomberait la connaissance du réel, au poète, à l'écrivain, voire au philosophe ou au spécialiste des Sciences Humaines, celle des productions mythiques. et, de fait, si la recherche scientifique semble depuis longtemps ordonnée au modèle expérimental: découvrir des hypothèses explicatives et les vérifier afin de parvenir à un point de vue universel avéré par la reproductibilité de phénomènes provoqués expérimentalement, elle n'en est pas moisn asservie à des impératifs qui la datent, à des systèmes d'images qui la régissent.
Savante et utile. elle concerne pourtant "l'ensemble de connaissances et de recherches ayant un degré suffisant d'unité, de généralité, et susceptibles d'amener les hommes qui s'y consacrent à des conclusions concordantes qui ne résultent ni de conventions arbitraires, ni de goûts ou intérêts individuels qui leur sont communs, mais de relations objectives qu'on découvre graduellement et que l'on confirme par des méthodes de vérification définies"[12].
Observer l'objet, le mettre à distance sont les garants de l'objectivité. La vérité est dés lors un principe certain qui ne saurait être mis en doute parce qu'il se fonde sur une conformité indiscutable entre la connaissance du sujet et la réalité de l'objet connu, la preuve étant administrée sur la base d'hypothèses formulées, sur l'enchaînement des causes et des effets sur les réponses apportées aux stimuli induits par l'expérimentateur.
Pour assurer la longévité d'une théorie scientifique, il importe prioritairement d'étudier le réel à travers l'usage de l'a-priori. Le processus scientifique, dans ce cas consistant à découvrir progressivement une réalité pré-existante que l'on s'attachera à déconstruire en éléments simples (analyse) à quadriller (codes et langages). La Raison "se déploie dés lors dans l'univocité des mesures et des définitions"[10b].
Une autre caractéristique de la recherche savante consiste dans la prise en compte prioritaire du signe, voire, par réduction à l'élément le plus simple, la substitution au réel des signes du réel. L'homme s'enhardit ainsi à s'autoriser à se reconnaître comme seul auteur de sa (ou de la) vérité, le savant devenant un constructeur culturel, un créateur, celui qui maîtrise la nature.
On retrouve ce même parti pris dans la recherche dite orientée: elle concerne alors un problème particulier à résoudre: ce qui peut être vrai, doit être vérifié.
Les Sciences Humaines dans une grande mesure n'échappent pas à ce modèle, s'y étant alignées et ne prenant que peu de libertés avec lui.
Jetant les bases d'une anthropologie scientifique, Bronislaw Malinowski ouvrait, dès 1944, de nouvelles voies en regrettant que sous prétexte d'asseoir leur édifice sur la méthode scientifique, de nombreux chercheurs en Sciences Humaines utilisant comparaisons organiques et métaphores mécaniques, puissent croire que la numération et la mesure "suffisent à départager la science et le laïus, ces ficelles, estimait-il, tout comme l'emprunt et la référence aux autres disciplines ayant fait plus de tort que de bien à la sociologie"[13]. Et d'affirmer avec force: "la science ne commence qu'à l'instant où les principes généraux doivent affronter l'épreuve des faits".
C'est sur la base de cette confrontation aux faits, dans une perspective transculturelle et transsociétale, que de nouvelles recherches viennent élargir les études comparatives classiques en les faisant porter sur plusieurs cultures, sociétés, nations, voire en interrogeant des pratiques autrefois refoulées dans l'inconscient collectif et d'ailleurs d'autant plus présentes[14]. Là, la recherche, en son objet est moins ordonnée à la production d'explication basée sur des enchaînements de causes à effet que de comprendre des corrélations elle débouche sur des comparaisons, se réfère à la complexité des phénomènes étudiés, révise le statut du sociologue qui "abandonne le point de vue divin"[15].
Les critères de la recherche: opérations.
Présente dans le latin "circare": aller çà et là, l'idée de recherche est pourtant bien concomitante d'un parcours, à la fois dans le sens de la courbe: (de l'indo-européen KER1: faire le tour de), mais encore dans celui de l'exercice intellectuel (KER2) ou encore de couper, diviser (KER3). Il est frappant de voir que ce dernier sens a peu à peu occulté les deux autres réduisant souvent toute recherche à l'opération sans doute très nécessaire mais non suffisante de distinction.
Difficulté déjà pointée par Jean-Jacques Wunenburger[16] dénonçant l'asservissement des Sciences de l'Homme aux méthodes d'abstraction, de métrique, de légalisme des Sciences de la Nature, les emprisonnant dans un modèle linéaire et de pointer les coïncidences troublantes qu'il observe entre le triomphe de la pensée rationaliste et la systématisation des génocides, qu'ils portent l'habillage stalinien ou hitlérien. Alors qu'elles avaient crû remporter une victoire sur l'homme, estime-t-il, en l'arrachant à la métaphysique, à la morale et à la religion, en remplaçant les opinions subjectives par des lois, les Sciences Humaines voient leur objet se vider, devenir de plus en plus transparent et univoque, aboutissant à un formalisme vide. "Leur crise est une crise de l'homme et du déploiement de son savoir". Ceci amène de nombreux chercheurs en Sciences Humaines à se demander, comme Jacques Ardoino si "toute théorie scientifique apparaissant comme une axiomatique et le principe de sa validité, de sa rigueur et aussi de son enfermement, l'excès de formalisme ne se fait pas au détriment du sens et de la création véritable, qui est le fruit d'une rupture plus que le produit d'une combinatoire[17]".
Réflexion également présente chez Michel Maffesoli qui estime que trop de rigueur éloigne du réel, rejoignant Fourastié quand il écrivait que "toutes les vérités sont des hypothèses et que les théories ne sont que des écritures, de ouvertures alors que cependant l'objet se dérobe, étant en mouvement et que la vérité est relative, tributaire de la situation, le sens étant aussi geste, action, image"[18]. Se pose à ce moment la question du sujet observant, du chercheur confronté à cette mobilité , devenant à la fois acteur et lui-même sujet de la recherche.
Pour Claude Levi-Strauss: "l'homme ne se contente plus de connaître; tout en connaissant davantage, il se voit lui-même connaissant, et l'objet véritable de sa recherche devient un peu plus, chaque jour, ce couple indissoluble formé par une humanité qui transforme le monde et qui se transforme elle-même au cours de ses opérations".
Manuel de Dieguez attribue cette nouvelle posture à "la réintroduction de la transcendance du sujet dans la psychologie moderne par le biais de la psychanalyse, laquelle constitue une révolution de la pensée moderne dont nous n'avons pas encore mesuré toute la portée"[19]).
La pensée savante, en résumé, obéit auximpératifs du contrôle selon des normes préétablies, d'un déterminisme linéaire (mono rationalité de type cartésien), de la hiérarchisation des savoirs: pour maintenir la reproduction des institutions, dans ce cas, la primauté est mise sur l'effet de force.
De fait, Gilbert Durand a montré[20] que l'examen de l'évolution de la pensée scientifique en Occident montre que celui-ci s'est trouvé fondé sur "l'échelonnement temporel et progressif d'états du monde , sur la mécanique fatale d'une histoire hypostasiée, ce qui allait inspirer la conquête du monde aux XIVème -XVème siècles comme celle d'un libre esprit scientifique: Guillaume d'Occam, les nominalistes, Luther etc"... Cette pseudo universalité unidimensionnelle et rationaliste est, pour lui, démentie par les terreurs de l'histoire et par la découverte de la pensée sauvage qui met en évidence l'universalité de l'archétype et du mythe.
Par ailleurs, l'évolution de la recherche a donné lieu à l'émergence d'une autre attitude: la clinique qui postule un autre statut de cohérence et de validité de la recherche, elle revendique des modèles plus biologiques, anthropologiques, réhabilite le libidinal, l'imaginaire, l'hypercomplexité des phénomènes et sujets étudiés. Elle conserve ouvert comme heuristique l'abîme de la contradiction, de la réfutation, de la liberté de penser, récupère le tiers exclu et ses capacités de liaison dynamique, retrouve un modèle logique triadique[21]. Elle ouvre ainsi la voie à une nouveau langage ou métalangage: herméneutique, réintégrant les dimensions spirituelles, métaphysiques, théologiques, elle produit des symboles et des mythes.
Certes, les deux postures, celle de la recherche et celle du mythe tendent à rationaliser le réel, à le relire dans une perpective ordonnée, mais la pensée mythique a ceci de particulier qu'elle s'inscrit dans une autre perspective, celle d'un trajet, d'une dynamique formée par les positions antagonistes et complémentaires de la nature et de la culture, de ce que Nietzsche appelait les forces apolliniennes et les forces dionysiaques. Il est méta histoire, méta langage, récit non démonstratif, carrefour où convergent toutes les intimations historiques, sociales, philosophiques, psychologiques.
Le mythe, parce qu'il porte en tant que formation symbolique la vérité subjective d'une culture, d'un groupe social, d'un pays e de ses habitants agit comme révélateur, est saisi comme prise de conscience plus que comme objet, il favorise l'intelligence active. Il est une catégorie du symbolisme car il porte à la fois ce qui a toujours été caché aux sociétés et que pourtant elles ont toujours su et ce qui les a toujours amené à négocier dans leur rapport au réel. Le mythe est présent dans l'imaginaire de tous les peuples, et c'est si vrai que sans cesse les peuples, ne cessent de le réinventer tant il est vrai qu'il constitue le miroir dans lequel ils ne cessent de se regarder. En rendent compte les langages qui le portent, nous façonnant comme nous les fabriquons: l'astrologie, les voyances, le roman livresque ou photo, les séries "people", a côté du cinéma et des théatres, mais aussi la psychanalyse, les structuralisme, chacun à leur niveau, dans des systèmes de codification absolument hétérogènes entre eux mais homogénes quant à leur visée implicite enrendent parfaitement compte pourvu qu'on les considére avec quelque distance.
Le mythe, "objet irréel pourtant constitutif d'un désir fait de deux mystères"(Cassirer), relève du pensé et du vécu, mieux, il interroge profondément les catégories de la Modernité. Antinomique du réel dans le langage courant, il se donne à voir comme réel. On peut cependant se demander si sa réalité ne s'impose pas à la recherche. Ainsi pourrait-on soutenir le paradoxe qui établirait le fait que toute pensée scientifique est d'abord une pensée mythique, que la catégorie du mythique interroge nos certitudes les mieux établies comme toute recherche en Sciences anthropo-sociales. Pour Claude Levi-Strauss (La Pensée Sauvage), l'opposition entre l'ordre du sensible et celui de l'intelligible est de plus en plus dépassée, la science s'appliquant à réintégrer le domaine du sensible en retrouvant ce qui se trouve à l'origine des croyances et rites populaires[22].
Loin d'un rationalisme nous imposant le morcellement des phénomènes sociaux et culturels alors que tous les domaines qui les concernent sont liés, chaque expérience de la vie collective peut, dés lors, être lue comme ce que Mauss appelait "un fait social total". C'est justement l'atout majeur de la pensée symbolique-mythique que de pouvoir, dans l'ordre du spéculatif, combiner les éléments qu'elle accumule en leur donnant une suite significative. "Croire aux Images est le secret du dynamisme psychologique" écrivait Gaston Bachelard[23]. En effet, comme ce qui importe dans le mythe c'est la forme et non le contenu, sa capacité de s'appliquer à n'importe quel objet[24], il apparaît bien comme un fait transversal en nous parlant simultanément à plusieurs niveaux:
il est quête de l'immortalité, nous enseigne l'origine des choses,
il est vécu dans un calendrier précis, profondément inscrit dans une temporalité matérialisée par la fête dont Jacques Ardoino nous rappelle qu'en hébreu elle est assimilée au temps,
il est éminemment social, instituant l'individu comme membre du groupe et le groupe dans les traditions qui sont communes à ses membres, il s'oppose en cela à l'individualisme,
il réincarne l'Ame au centre d'un Monde où il se reconnaît alors que l'épistèmé moderne est régie par la séparation du sujet et de l'objet, l'homme n'étant plus qu'un point quelconque de l'univers.
La résurgence moderne des images, des surréalistes (et l'on se souvient tout l'intérêt porté par Breton, Gracq et quelques autres à l'imaginaire Arthurien) aux psychanalystes via le Nouvel Esprit Scientifique d'un Bachelard ne sont pas sans nous interroger profondément sur la capacité qui se manifeste particulièrement dans les mythes à dresser une espérance contre le monde objectif de la mort.
Nostalgie, diront certains, que ce recours au mythique, sans doute, car dans ce grand bond en avant dans le nouveau contre les régressions du modernisme, le mythique ne s'appuie t-il pas, comme le pense Laurent Dispot[25], sur l'archaïque en le systématisant?
Nous avons en tout cas à nous appliquer à le reconnaîre, car "Une communauté qui n'accomplit pas la possession rituelle de ses mythes, écrivait Roger Caillois, ne possède plus qu'une vérité qui décline: elle est vivante dans la mesure où sa volonté d'être anime l'ensemble des hasards mythiques qui en figurent l'existence intime. Un mythe ne peut donc pas être assimilé aux fragments épars d'un ensemble dissocié. Il est solidaire de l'existence totale dont il est l'expression sensible"[26].
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Références:
1.- Morin, Edgar, La Méthode-3, La Connaisance de la Connaissance-1, Paris, Le Seuil, 1986, p.155 sq.
2.- Brohm, Jean-Marie, Galaxie Anthropologique-Transversalités, Paris, N.E.A., No1, Avril 1992.
3.- Cité par Balandier, Georges, in Le Mythe de l'Etat, Ernst Cassirer, Le Monde, 29/01/93.
4.- Morin, Edgar, op.cit. p.166.
5.- Laburthe-Tolra, Philippe et Warnier, Jean-Pierre in Ethnologie Anthropologie, Paris, P.U.F., 1993, p.168.
6.- Smith, Pierre, article Mythe in Encyclopedia Universalis, 1983.
7.- Levi-Strauss, Claude, De près et de loin, entretien avec Didier Eribon, Odile Jacob, 1993, p.133.
8.- Verdier, Paul, intervention au Colloque Lancelot du Lac, Rânes, 1989, éd l'Orne en Français.
9.- Ibidem.
10.- Ricoeur, Paul, Le Conflit des Interprétations, Paris, le Seuil, 1967.
10b.- Ardoino, Jacques, Propos actuels sur l'Education, Paris, Gauthier-Villars, 1978, p.80.
11.- Grawitz, Madeleine, Lexique des Sciences Sociales, Paris, Dalloz, 1981.
12.- Lalande. Vocabulaire de la Philosophie, Paris, PUF.
13.- Malinowski, Bronislaw, Une théorie scientifique de la Culture, Paris, Points Seuil, 1970, p.17sq.
14.- Plusieurs sujets "honteux" apparaissent ainsi, nous avons nous même interrogé la Fête locale (notre thèse de doctorat Paris 8 1989), les Apparitions/disparitions (Desclée de Brouwer 1999) et l'on peut s'interroger sur les cris effarouchés que poussent nos modernes scholastiques sur le fait qu'une astrologue interroge sa pratique (l'affaire ET 2001) tout au long d'un travail de 900 pages lorsque l'on voit une thèse de 120 pages établie sur 3 séries de comptages statistiques être qualifiée de "thèse historique" par ses promoteurs (Grenoble Psychologie, Janvier 1994).
15.- Morin, Edgar, Introduction à la pensée complexe, Paris, ESF, 1990.
16.- Wunenburger, Jean-Jacques, Pour une subversion épistémologique in Galaxie de l'Imaginaire, Berg, 1980.
17.- Ardoino, Jacques, Education et Politique, Paris, Gauthier-Villars, 1977.
18.- Fourastié, Bernard, Raison Gardée, in Sociétés, Dunod, 1992.
19.- Dieguez, Manuel (de), Jésus, Paris, Fayard, 1974.
20.- Durand, Gilbert, Beaux Arts et Archétypes, Paris, PUF, 1989, p.11-12.
21.- Ardoino, Jacques, Propos Actuels sur l'Education, Paris, Gauthier-Villars, 1971, 5ème éd., p.84.
22.- Ibidem, p.155.
23.- Bachelard, Gaston, L'Air et les Songes, Paris, José Corti, 1990, p.291.
24.- Brohm, JM et Thomas, L-V, in Galaxie anthropologique, transversalités, No1, 1992, p3.
25.- Dispot, Laurent, Manifeste Archaïque, Grasset, Figures, 1986.
26.- Caillois, Roger, l'apprenti sorcier in Le Collège de Sociologie, Paris, Idées Gallimard, 1979, p.56.
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Bertin, Georges. 'Actualité du mythe', Esprit critique, vol.03 no.08, Août 2001, consulté sur Internet: http://critique.ovh.org |
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